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Deux questions à Alexandra Aleveque

La coréalisatrice de "21 jours" vient de publier le livre "Les gens normaux n’existent pas" 

Culture société
Publié le 27/02/2017

2 questions à Alexandra ALEVEQUE à l’occasion de la publication de son livre « Les gens normaux n’existent pas », chroniques des reportages 21 Jours.

Alexandra ALEVEQUE a incarné et co-réalisé pendant 4 ans la collection de documentaires 21 Jours. Le principe : durant 21 jours, une journaliste vit avec (et parfois comme) une communauté de gens. 12 documentaires ont ainsi été réalisés auprès de religieuses dans un couvent, d’urgentistes du CHU de Lyon Sud, d’ouvriers sous-traitants automobiles à Sochaux, ou encore d’un groupe de formateurs bénévoles et d’adultes en situation d’illettrisme auprès de l’association Mots et Merveilles dans les Hauts-de-France. En février 2017 paraît la chronique de cette émission, car Alexandra ALEVEQUE a souhaité faire part de ce que ces quatre années d’émissions ont pu lui apporter, ce qu’elles ont parfois changé en elle, au gré des discussions avec les uns et les autres. Pour elle, « ce livre constitue une photographie de notre pays, un constat non exhaustif et parfois subjectif de la société française durant le quinquennat de François Hollande, à l'heure où les Français s'apprêtent à élire un nouveau président. » A l’occasion de la sortie de ce livre, nous lui avons posé deux questions à propos de son immersion dans cette association qui œuvre au quotidien pour accompagner les personnes en difficulté avec les compétences de base et les faire sortir de l’illettrisme.

Vous témoignez du fait que vous avez pu, comme bien d’autres, sous-estimer l’ampleur et la réalité du phénomène de l’illettrisme en France.  Comment avez-vous pris conscience qu’il s’agissait d’un vrai « sujet », qui méritait que l’on y consacre l’un des volets des reportages « 21 jours » ?

 

Quand nous avons commencé à évoquer l'illettrisme pour un numéro de la collection 21 Jours, j'avoue que j'étais très ignorante de ce problème. Je connaissais son existence mais ne mesurais pas sa désastreuse ampleur. C'est Philippe Lagnier, le réalisateur de ce film qui en a eu l'idée. Au fur et à mesure de l'enquête, j'ai pris conscience de ce fléau. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 2,5 millions d'adultes illettrés ne sont pas un détail au sein de notre société. Mais que signifie être un adulte illettré, y intègre-t-on les étrangers nouvellement entrés sur notre territoire et pour qui une mauvaise maîtrise de notre langue est compréhensible ? Les illettrés ont-ils  été scolarisés ? La réponse fait froid dans le dos. Ces hommes et ces femmes sont exactement comme moi : des Français qui sont allés à l'école. Mais là où j'ai tant appris, d'autres n'ont rien conservé. Pourquoi moi et pas eux ? A partir du moment où cette question est apparue, elle s'est imposée. Nous devions traiter ce sujet. Sans le moindre doute.

 

Les personnes confrontées à l’illettrisme se disent « invisibles ». Comment faire selon vous pour que chacun, à la place qui est la sienne, puisse être mieux sensibilisé à ces situations, et contribuer à faire reculer ainsi les idées reçues ?

 

On dit que les illettrés sont "invisibles" et pour cause. Ils se veulent comme tels, honteux de savoir mal voire pas du tout déchiffrer un texte, écrire ou comprendre quelques lignes. On comprend aisément la honte qui les frappe quand on est lettré. Mais compréhension n'est pas acceptation, il faut les aider à sortir de l'ombre, à se faire connaître, c'est le seul moyen pour eux de s'en sortir. Tous, à notre niveau, nous pouvons faire quelque chose : ouvrir l'œil dans la rue ou au supermarché quand un adulte demande à se faire aider sous des prétextes souvent fallacieux ; dans les banques ou les administrations où ils ont les plus grandes difficultés à effectuer les démarches les plus simples ; au sein des entreprises également puisque plus d'un million d'illettrés travaillent, ils ont forcément des collègues et des supérieurs qui peuvent les aiguiller s’ils se montrent un peu curieux ; dans les écoles, les directeurs et enseignants ne doivent pas s'intéresser qu'aux élèves mais également à leurs parents, les échanges entre eux et les établissements sont suffisamment nombreux pour repérer un manque. Bref, tous, nous pouvons, nous devons aider les illettrés à s'en sortir parce que c'est possible. Je l'ai vu de mes propres yeux. J'ai surtout assisté à la métamorphose morale et physique qui s'opère chez ceux qui découvrent les mots. Cette renaissance est la plus belle chose qu'il m'ait été donné de vivre.

 

Les gens normaux n'existent pas

Parution le 2 février 2017

Alexandra ALEVEQUE

Les gens normaux n’existent pas

Chroniques de 21 Jours

Préface d’Emmanuel Carrère

240 p. / 18 €  / Éditions ROBERT LAFFONT

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